La compétition stimule les progrès de l'aéromodélisme
Dans tous les domaines de la vie, les progrès résultent d'innovations stimulées par des besoins nouveaux. Voyez par exemple l'essor remarquable des sources d'énergie alternatives qui remplacent les anciennes centrales électrique au charbon, terriblement polluantes. Le moteur de l'innovation est dans ce cas de nature économique : on cherche à diminuer les coûts sans perte de confort. Du même coup, on remplace des installations très polluantes par des dispositifs nouveaux (éoliennes, panneaux photovoltaïques, etc.) qui arrivent, moyennant certains aménagements, à satisfaire la demande tout en réduisant les coûts.
En aéromodélisme, on ne mesure pas toujours très bien d'où l'on vient. Vers le milieu du XXème siècle, un Américain a inventé le vol circulaire... Formidable ! On arrive à réellement piloter les évolutions de son avion... du moins dans les limites d'une calotte sphérique déterminée par les câbles de commande. C'est aussi vers cette époque que l'on commence à comprendre les phénomènes atmosphériques qui permettent parfois à un planeur de vol libre de monter, plutôt que de descendre inexorablement pour regagner le sol. C'est lors d'un championnat mondial de vol libre que l'Allemand Lindner démontre pour la première fois l'exploitation des thermiques en planeur de vol libre F1A (la classe A2 de l'époque) ! Et on commence à développer des techniques pour détecter les ascendances, ainsi que pour s'en échapper une fois que le temps de vol souhaité a été atteint. Avant 1950, il n'existait pas de "déthermaliseur" ! Combien de modèles réduits se sont perdus en altitude, emportés inexorablement dans un thermique, au grand désespoir de leurs constructeurs.
Et toujours vers le milieu du siècle passé, la miniaturisation, encore bien modeste, de l'électronique permettait d'embarquer dans les modèles réduits d'avion un récepteur et des dispositifs électro-mécaniques (notamment les "échappements" inspirés de l'horlogerie) qui permettent de "piloter", souvent selon un seul axe, les évolutions du modèle en vol. La commande de plusieurs axes fait son apparition lors des championnats mondiaux de cette période lorsque l'Allemand Stegmaier équipe son modèle d'un système multi-canaux pneumatique avec lequel il peut agir à distance sur la profondeur, la direction les ailerons et le moteur. C'était une révolution pour l'époque. La radio-commande "proportionnelle" comme on la connait aujourd'hui ne fait son apparition que vers l'année 1960, notamment avec les ensembles américains Kraft.
Et avec la multiplication des radiocommandes apparaît le cauchemar des "interférences" causées par l'allumage d'une seconde radio alors que la première est en utilisation sur la même fréqunce. Le nombre de crashes qui sont survenus sur "interférence", d'abord entre radiocommandes, puis avec d'autres utilisateurs des ondes comme le "citizen band" est incalculable et cette source d'ennuis n'a été renvoyée aux oubliettes de l'histoire que tout récemment (il y a à peine cinq ans), en appliquant en radiocommande de modèles réduits des technologies sophistiquées venant de la téléphonie mobile. Saluons l'arrivée du "spread spektrum" en 2.4GHz.
Et le progrès en matière de sécurité de la liaison radio ne vient pas seul. Un récepteur 2.4GHz est aussi beaucoup plus petit que ce que l'on arrivait à faire en 35, 40 ou 72 MHz. Avec cette miniaturisation, on peut songer à réaliser des modèles plus légers, plus petits, etc.
Une autre plaie a affecté l'aéromodélisme motorisé depuis ses origines : je veux mentionner le moteur "à explosions". Les petits moteurs à allumage (depuis longtemps abandonnés, excepté par quelques nostalgiques) ou à autoallumage ("glow plug" ou "diesel") avaient permis le décollage du vol circulaire, puis la propulsion des avions radiocommandés. Mais cela s'accompagnait toujours d'un vacarme assourdissant. Ce n'est que peu à peu que les fabricants, cédant à la pression de leurs clients, ont développé des silencieux installés sur les échappements pour en limiter quelque peu les miaulements déplaisants. La FAI n'a imposé les silencieux en vol circulaire que depuis une dizaine d'années, et la limite de bruit émis en F3A a moins de 20 ans...
Heureusement, des chercheurs ont réussi à utiliser des moteurs électriques pour la propulsion d'avions modèles réduits. Les premiers moteurs utilisaient des aimants en "ferrites" comme ceux qui équipent encore aujourd'hui nos petits aspirateurs de table. Les moteurs aux aimants composés de "terres rares" (les célèbres "samarium-cobalt" inventés par Heinz Keller) ont ensuite dominé quelque temps les compétitions, au temps où les seules batteries utilisables étaient les "nickel-cadmium". Batteries lourdes et de durée de vie limitée, surtout si on en tirait des courants importants. C'est d'un Américain participant aux championnats mondiaux de planeurs électriques qu'est venue la révolution suivante : Steve Neu a écrasé toute la concurrence avec ses moteurs à cage tournante, sans balais, utilisant la technologie des moteurs dits "pas-à-pas". Plus de balais, plus d'aimants, mais une électronique qui s'occupe de l'alimentation. Le moteur "brushless" était né et allait révolutionner définitivement la propulsion électrique de modèles réduits. Avec le moteur électrique, plus de vibrations, plus de résidus huileux qui viennent maculer les plus belles finitions, et plus de bruit provenant du moteur. C'est vers l’optimisation des hélices que l'on doit désormais se tourner pour abaisser encore le niveau sonore.
Et provisoirement, dernière en date des révolutions, c'est le remplacement des batteries Ni-Cd ou Ni-MH par les batteries "lithium-polymère", qui ont été développées pour alimenter moult dispositifs mobiles contemporains : ordinateurs portables, GSM, tablettes, smartphone, etc. Connues désormais en plusieurs déclinaisons, les "LiPo" combinés aux moteurs brushless permettent aujourd’hui de remplacer avantageusement les bruyants et polluants moteurs thermiques. Cela va du plus petit modèle destiné à évoluer en salle (on se souvient du modèle radiocommande de masse totale de 1gr présenté lors d'une exposition chez Nearly New Car à Bruxelles il y a quelques années) au gros modèle de classe F3M, de 3 mètres d'envergure et pesant une vingtaine de kg, capable d'effectuer tout le programme acrobatique imposé aussi bien, si pas mieux que son homologue équipé en moteur thermique,
Je terminerai en mentionnant que les petits modèles électrique destinés à la course au pylône égalent tout simplement les performances des avions de classe F3D équipés de moteurs .40; au point que les compétitions de course au pylône se déroulent dorénavant en même temps pour les deux types de modèles. Réjouissons-nous de pratiquer ce magnifique hobby, en évolution permanente, et dont les progrès, comme dans bien des sports, sont littéralement propulsés par les innovations venues de la compétition.
RH